Acclimatation


Toute montée en altitude demande à l'organisme de s'adapter à ces nouvelles conditions, à savoir une pression atmosphérique en baisse, donc une quantité d'oxygène disponible en diminution, c'est l'hypoxie.

La quantité d'oxygène que le corps arrive à transporter (VO2 max) n'est ainsi plus que 70 % au sommet du Mont-Blanc, et 20 % au sommet de l'Everest. Un individu déposé instantanément à 8800 m s'évanouirait en quelques minutes avant de mourir !

Cette adaptation, la réponse à l'hypoxie, se fait d'abord pendant quelques dizaines d'heures avec une respiration et un rythme cardiaque qui s'accélèrent. C'est l'accomadation. C'est la situation rencontrée dans les Alpes avec des courses en altitude au départ d'un refuge.

Puis, au bout de quelques jours, une production de globules rouges supplémentaires intervient, afin de pouvoir transporter plus d'oxygène. Seulement, cette acclimatation demande du temps, donc de la patience afin de ne pas monter trop vite trop haut ! Si l'on ne respecte pas cette règle de base, on s'expose au MAM, le Mal Aigu des Montagnes.

Le temps nécessaire pour s'acclimater dépend essentiellement de paramètres génétiques, puis de la fatigue et de la condition physique préalables.

Quelques rappels:

Il n'y a pas moins d'oxygène dans l'air que l'on respire en altitude. Ce qui change, c'est la pression atmosphérique, donc la pression d'oxygène et la capacité du corps à le transporter.

Pression d'oxygène au niveau de la mer: 100 %
A 4808m (Mont-Blanc) : 53 %
A 5000m : 50 %
A 8848m (Everest) : 30 %

Les plus hauts habitats permanents ne dépassent pas 5500m. Au-delà le corps se détériore de manière inéxorable (fatigue, puis faiblesse). La récupération ne peut s'effectuer par conséquent qu'au-dessous de 5500-6000m. Les facultés intellectuelles sont également touchées à partir de cette altitude (écriture, logique, réponse à des ordres simples ralentie).
Au-delà de 7000m, la détérioration est apparente après quelques nuits seulement. Sommeil irrégulier (apnée), perte d'apétit, l'apathie entraîne une diminution de la nourriture et des boissons ingurgitées. On perd du poids et la masse musculaire fond. On note des changements de comportements, des attitudes bizarres et irrationnelles.

Mal aigu des montagnes (MAM):

L'apparition des symptômes correspondants au MAM est le signe d’une acclimatation incomplète. Les signes cliniques apparaissent entre 4 et 8 h après l’arrivée en altitude, au-dessus de 3500 m. Une personne sur deux (50 %) en ressent les désagréments, 1 % connait des complications graves comme l'oedème pulmonaire ou cérébral.

L'oedème pulmonaire est provoqué par une accumulation de fluides dans les poumons. Cela commence par un essoufflement chronique, puis une toux avec production de mousse rose, puis se termine par une "noyade" dans ses propres fluides.

L'oedème cérébral est provoqué par une accumulation de fluides dans le cerveau. Les symptômes en sont maux de tête, perte d'appétit, nausées, fatigue puis apathie. Surviennent ensuite des pertes d'équilibre et de coordination, coma et mort.

Il est donc important de connaître ces symptômes afin de les détecter et surtout d'évaluer la dangerosité de la situation. Peut-on continuer, suffit-il de passer une nuit ou deux à la même altitude, ou faut-il descendre immédiatement ?

Règles de base:

Règles pratiques:

On conseille en général de ne pas dormir plus de 300 à 400 m plus haut chaque nuit. Si cela n'est pas possible, il faut prévoir de dormir à la même altitude la nuit suivante.

Il faut en outre boire beaucoup, plusieurs litres par jour (soupes, thé, etc...). La déshydratation en (haute-) altitude est favorisée par l'effort, le rythme respiratoire accéléré qui nous fait exhaler de la vapeur d'eau, et par la sécheresse de l'air qui augmente avec l'altitude. De plus l'augmentation de globules rouges épaissit le sang. La boisson et l'aspirine le liquéfient.

Il faut ménager l'organisme. En effet, il a déjà suffisamment à faire pour s'acclimater ! Cela signifie une fois de plus monter lentement, et se reposer une fois arrivé au camp. Il est préférable d'avoir une légère activité plutôt que de dormir, comme la lecture, le dessin ou les jeux.

Cependant, si des symptômes apparaissent, voici comment les évaluer:

SYMPTOMES
POINTS A CUMULER POUR CHACUNS
Céphalées (maux de tête)
1
Insomnies
1
Nausée, perte d’appétit
1
Vertiges
1
   
Céphalées ne cédant pas à l’aspirine
2
Vomissements
2
   
Difficultés à respirer au repos
3
Fatigue anormale ou importante
3
Baisse de la diurèse (baisse des quantités urinées)
3

SCORE

  • 1-3: MAM léger, prendre de l’aspirine
  • 4-6 :MAM modéré, aspirine, repos et stopper la progression en altitude
  • 6+ :MAM sévère, descente impérative !

Ne pas continuer à monter si les symptômes persistent. En tous cas ne jamais dormir plus haut si ils sont déjà présents !
Si les symptômes empirent au repos, la descente est impérative !

TEST DE LA LIGNE IMAGINAIRE (test du conducteur alcoolique) : permet de détecter une perte de coordination (ataxie) chez une personne atteinte de nausées, vomissements et fatigue. En cas d’ataxie, la descente doit être immédiate (risque d’œdème cérébral).

ESSOUFLEMENT : Si l’on est toujours essouflé 10 mn après un effort, la descente est immédiate (risque d’œdème pulmonaire).

LIGNE D’ACCLIMATATION : La descente à une altitude où l’on se trouvait 4-8hh avant l’apparition des symptômes devrait permettre de les faire disparaître.

DIAMOX (Acetazolamide) :
Le Diamox est à l'origine un diurétique, c'est-à-dire qu'il favorise la diurèse ou la quantité d'urine. Il diminue donc l'accumulation de fluides dans l'organisme. On peut le prendre soit pour la prévention, avant un grand dénivelé inévitable ou une ascension, soit en traitement.

Prévention : 125 mg toutes les 12h
Traitement : 250 mg toutes les 12h

La prise de Diamox peut améliorer aussi le sommeil. De légers pertes de sensation des mains ou des pieds peuvent se produire, ainsi qu'une fatigue supplémentaire.
Si l'on prend du Diamox, il faut encore augmenter sa consommation de boissons pour éviter les risques de déshydratation !


Profil du dénivelé de notre trek:

A titre d'exemple, nous avons recréé le profil de notre trek de 3 semaines. L'acclimatation s'est révélée parfaite puisque que nous n'avons jamais eu de problèmes, pas de troubles du sommeil (à part le froid et les petits déagréments intestinaux...), nous n'avons pris en tout et pour tout que 3 aspirines à nous deux et pas de Diamox ! Simplement en respectant la règle de base, à savoir monter len-te-ment !

Cependant, bien que nous ayons été correctement acclimatés, nous avons quand même été essoufflé lorsque nous faisions des efforts ou montions trop vite. L'appétit n'était pas toujours au rendez-vous lors des pauses aux sommets ou aux cols, mais rien de très grave !

Nous y avons superposé le rythme cardiaque d'Alain, mesuré tous les soirs ou presque, au repos, vers 16h00, avec un cardio-fréquencemètre. On remarque bien la baisse du rythme lorsque nous sommes restés à la même altitude pendant 2 nuits ou redescendus, ou alors l'augmentation à la montée et après les longues journées de 6 à 7 heures de marches.


 

Sources:
Le Manuel de la Montagne, Club Alpin Français, Seuil, oct. 2000
Lonely Planet, Trekking in the Nepal Himalyay, 8th edition, 2001
Fiche technique de la FFME

Pour en savoir plus sur l'altitude, l'excellent site de l'expédition suisse au Shisha Pangma en 2002, Dialogue Avec les Hauteurs.