Une nuit en refuge, un couloir de 300m remonté crampons aux pieds et une descente sous la face nord des Grandes Jorasses, cette course variée au coeur du Massif du Mont-Blanc présente d'indéniables atouts !
Deux mots sur la genèse de cette course. Jean, le papa d'Alain, est au sommet de sa forme du haut de ses 70 ans. Il y a un moment déjà que nous pensions faire une belle sortie, marquante, avec lui. Pour que la fête soit complète, nous l'organisons avec Gilles Ravanel, guide d'Argentière (voir nos sorties ensemble ici, ici, là,et encore ici et là), dont Jean avait été le client à de très nombreuses occasions il y a plus de 20 ans. Ils n'avaient pas refait de sorties ensemble depuis 5 ans !
C'est donc dans une atmosphère conviviale que tout ce petit monde se retrouve à 15h au départ du téléférique de l'aiguille du Midi. Pour couronner le tout, nous apprenons à ce moment que Jean est grand-père pour la 1ère fois, d'un petit Aedan. Départ dans l'allégresse pour le sommet de l'Aiguille, puis descente de la Vallée Blanche en direction du Refuge du Requin. Les sacs sont lourds, c'est fou comme le poids augmente dès qu'on y met des crampons, un piolet, une corde... Dès les premières pauses, Jean et Gilles se mettent à papoter comme au bon vieux temps. De vraies concierges! Et se sera comme ça pendant 24h, la nuit en moins ! Passer la nuit au Refuge du Requin permettra d'être plus relax demain. Il est 16h et il n'y a personne d'autre dans ce coin magique. Incroyable. On pourrait encore dire que la neige était un régal, mais hélas... elle se révèle vite infâme. Pas grave, nous arrivons sains et saufs au refuge.
Itinéraire: Depuis le refuge du Requin (2516 m, la course peut se faire à la journée) descendre au-dessous de la Salle-à-Manger vers 2400m et remonter la rive droite du Glacier des Périades. Vers 2800m part à gauche l'itinéraire pour le Col du Tacul. Continuer en s'orientant vers l'Est, en direction de la Pointe Sisyphe. Contourner un îlot rocheux par la droite et remonter une dernière pente raide. On aperçoit alors le couloir, orienté SO, caché jusqu'à présent. Le remonter à pieds jusqu'à la brèche (300m à 40-45°). Un rappel de 40m (50m plus confortable, sangles en place) dépose alors sur le Glacier du Mont Mallet.
Descente: Rester au début en rive droite du glacier, tourmenté et crevassé. Vers 3000 m, traverser à droite vers le centre du glacier et rejoindre le Glacier de Leschaux, puis la Mer de Glace
Réveil à 6h le lendemain, départ à 7h. Descente sans histoire, puis nous montons en face, de l'autre côté du Glacier du Tacul. Il ne fait pas froid, les sommets commencent a être éclairés par le soleil, belle ambiance. Par contre, toute la montée se fait à l'ombre, au moins on ne souffre pas de la chaleur ! En deux grosses heures nous avalons les 730 m qui amènent au pied du couloir. Derrière nous se dresse la Dent du Géant, et l'Aiguille de Rochefort apparaît juste derrière une arête. Nous étions là-haut il y a 8 mois, avec Gilles justement. Petite collation tout en enlevant les peaux et en mettant les crampons et finalement en s'encordant. Vu d'ici, le couloir à l'air méchamment long. Dans un topo, 300 m paraît négligeable, mais là... Et puis il est raide, et étroit. Bref, première course alpine de l'année ! Avec les skis sur le sac, c'est bien alourdis que nous débutons la montée, avec une interrogation: la neige sera-t-elle assez ferme pour ne pas trop brasser ? Depuis le passage perturbée d'il y a quelques jours, personne n'est monté plus haut que la base du couloir...
Gilles part devant, bataillant dans le cône de déjection, parmi les boules et les blocs qui sont descendus. Il est encordé avec Jean, Maud et moi suivons. Les 50 premiers mètres sont vraiment laborieux, nous entendons même Gilles jurer, c'est dire ! Puis quand la pente se redresse, on peut emprunter la goulotte d'écoulement, plus dure, voire glacée par moment, il faut même parfois planter les pointes avant des crampons. A mi-parcours nous changeons la composition des cordées, Maud se sent plus rassurée de monter avec Gilles. C'est vrai que c'est la première montée sérieuse de couloir cette année, et que le vide qui se creuse demande une petite accoutumance. Alain et Jean, père et fils, cordée à nouveau réunie, mais dans un ordre inverse, suivent derrière. Une autre cordée passe devant et nous bénéficions cette fois de traces déjà faites. La montée continue sans encombre, avec quelques pauses pour reprendre son souffle. Maud est à présent au sommet du couloir, dans la brèche, au soleil ! Alain et Jean y parviennent aussi, 1h50 pour remonter cette pente. Pas fâchés d'être arrivé ! Bravo Jean, tu as dignement marqué tes 70 ans, et surtout l'arrivée de ton petit-fils !
Le paysage de l'autre côté de la brèche, fort étroite, est baigné de soleil. Les pentes douces contrastent avec celles du couloir. Gilles installe une moulinette et descend tout le monde sur la glacier, 40 m plus bas. il est temps d'enlever les crampons, de se décorder, et enfin de se poser quelques minutes, assis sur son sac, et de manger quelque chose ! Le cadre est impressionnant, un grand cirque délimité par les Périades d'où nous venons, le Mont Mallet, le Dôme de Rochefort et surtout la face nord des Grandes Jorasses, qui paraissent à portée de main. Bref, quelques 4000, et non des moindres !
Nous entamons la descente dans une neige assez bonne, rien à voir avec celle trouvée sur la Vallée Blanche ! Heureusement ! Nous tâchons de profiter des toutes ces sensations: la glisse, les virages, les crevasses impressionnantes, les sommets au-dessus de nous. Jean, bien que fatigué, enchaînent encore les virages ! Quel courage ! De belles pentes, pas trop raides, conduisent sur le Glacier de Leschaux. C'est maintenant tout plat, il suffit de se laisser conduire jusque sur la mer de Glace. On retrouve alors la foule des grands jours, et c'est encore pire quand il faut faire ensuite faire la queue pour prendre le télécabine qui ramène au train du Montenvers.
Cela ne fait qu'augmenter la satisfaction d'avoir fait une belle boucle, sur un itinéraire sortant des sentiers battus, avec le sentiment d'avoir gagner sa descente. Bravo Jean, tu as assuré, merci Gilles de t'être occupé de nous tous. Et je rigole encore quand je pense avoir dit à Jean: " Oh, pas de soucis, il n'y a que 1050 m de dénivelé, une bricole, tu as fait bien pire !" 24h après, j'ai encore mal aux jambes !!
Date: 6 avril 2007 |
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Carte: CNS 292 Courmayeur 1/50000, IGN xxx |
Topo: Labande "Haute-Savoie", course XXX; Guide Vamos "Mont-Blanc Ski de randonnée", course 29; C2C SkiRando |